Le temps, pourquoi le temps

Publié par Marie Dominique LUCIANI

Le temps pour quoi?

Tu n’as pas su ; tu n’as pas su dire, n’as pas su faire. Tu as fui sans vraiment savoir pour quoi. La peur de l’inconnu ? L’appréhension d’une vie qui se referme ? Tu es parti pour partir sans savoir si tu pouvais rester .

Les semaines s’étaient écoulées, sereines ; ruisseaux paisibles, caresses de regards frais d’amours jeunes et sans contraintes. Le bruissement des feuillages éclairés de nos attentes se mariait à l’eau claire des montagnes. Nous nous aimions. Nos rires faisaient écho aux chants cristallins de cette nature protectrice. Tendresse et plaisir, effusions harmonieuses quand nos corps complices se lient et se délient comme autant de musiques sur les gammes des émotions transcendantes. Nous nous aimions. Nos corps se cherchaient, se trouvaient, s’abandonnaient dans une liesse qui n’a d’égal que la lumière faisant l’amour à l’oiseau qui s’envole.

Le temps de devenir?

Il a le regard noir et acéré d’avoir tant vu, d’avoir trahi, et de questions en suspens qu’il ne se pose plus. Lui restent ses certitudes et ses erreurs que souvent il renie. Troubadour de la vie, il croit qu’aimer peut se décliner, mais ne sais pas le conjugueur. Il vit de phrases simples, de mensonges erronés qui trompent sa vie. Il vit de s’écouter parler, par des mensonges qu’il invente et auxquels il finit par croire. Sa vie est un sac de nœuds qu’il se complait à défaire.

Mais il est des virgules, qu’il ne peut prévoir,

Des regards qu’il ne peut voir

Des caresses insoupçonnées

Qui pourraient tout lui donner

Il est des points où il ne peut s’arrêter

Ainsi s’envolent les bonheurs cachés.

Entre enfermements et cavales, provocations et vertus, jeux et convictions, les alternances, interprétées souvent comme des contradictions, ne manquent pas. Fier et altier, il joue avec les mots, recomposant ainsi au fil de ses déboires et de ses volontés, l’histoire de sa vie. Père avant tout, il tisse les vides de son enfance, dans le silence et la souffrance. Tant d’aller-retour pour avancer, sans se retourner, vouloir et vouloir encore car ne pas vouloir serait abandonner! Les vides de son passé deviendraient le néant pour les jours futurs. Trop d’ombres peuplent ses nuits et l’incertitude qui s’en suit. Les jours sont flamboyants et l’ordinaire l’ennuie. Ses racines bien ancrées, ailleurs et autrement est pour lui un défi permanent. Il part, loin des odeurs nauséabondes, des regards visqueux et des rumeurs sordides. Mais l’appel du grand large de sa liberté lui ramène inexorablement les parfums du maquis. Il voit loin, il voit l’immensité et ne peut rester sur des chemins muletiers. Demain il partira.

Le temps d'un bonheur?

Le rouge flamboie tout autour du soleil, la fontaine pleure au cœur de la rivière. C’est l’été, se ravivent avec lui les splendeurs impudiques aux parfums étonnants. Sa Corse le ranime de ce feu incessant de croire que vivre est bon tout en la regardant. Porterait-elle en elle un esprit confondant qui se rallie en lui pour qu’il trouve en elle celle que nul ne voit ? Lui et elle ? Perdu parmi les autres il ne sait qui il est ; au creux de son maquis son cœur se réjouit. Elle est lui, il est elle, lui et elle, comme une union qu’ils ont sacrée sans un mot sans un bruit. Seuls témoins, silences, bruissements pâleur du jour qui baisse, recoins et détours de chemins ; et puis tous leurs mystères.

La vie est limpide et claire quand les ombres s'estompent. Où est-elle, que fait-elle? Combien de nuits doit-il attendre pour revoir ce sourire, combien de miroirs à briser pour que sa voix s'éveille à lui? Quels murs doit-il franchir pour trouver leurs chemins? Quelles rivières, fleuves où océans viendront brûler sa peau jusqu'à ce que sa chair se parfume aux étés du bonheur.

Le temps, pourquoi le temps
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